est diplômé de l’Essec et étudiant à l’Ecole de guerre économique.
Pourquoi j’étudie l’intelligence économique...
Témoignage d’un
étudiant de la génération internet qui étudie
l’intelligence économique en se projetant dans des postes
de management en entreprise.
Né en 1979, j’ai toujours
connu la télévision et le Minitel. À 10 ans, mon
grand-père m’a installé devant mon premier PC. À
12 ans, j’ai eu mon premier pager, à 16 ans, mon
premier téléphone mobile, et à 19 ans, une connexion
internet. J’ai aujourd’hui 24 ans, et comme beaucoup d’autres
de ma génération, je pourrais difficilement me passer de
ces outils. Ils m’ont très tôt permis de satisfaire
une curiosité omnidirectionnelle : comment ne pas profiter de tant
de savoirs, de connaissances disponibles instantanément ?
Mieux exploiter l’information
Quand j’ai commencé ma formation au management,
j’ai rapidement eu l’impression que cette masse d’informations
disponibles n’était pas véritablement exploitée
dans le processus de prise de décision stratégique. Cette
impression s’est renforcée au fur et à mesure de mon
cursus, avec des exemples (trop rares) d’utilisation performante
de l’information et d’autres (trop nombreux) de décisions
inappropriées car fondées sur de mauvais renseignements.
L’exemple du lancement de la console de jeux Playstation
2 de Sony, en novembre 2000, m’a particulièrement marqué : la synchronisation du teasing publicitaire avec la rupture de
stocks organisée dès le lancement commercial a suscité
un tel engouement que des échauffourées entre clients ont
eu lieu devant certains points de vente, offrant par là une couverture
médiatique (gratuite) de la sortie du produit... Je me suis donc
très vite décidé à approfondir le sujet et
à chercher une formation qui pourrait compléter mon parcours
et satisfaire mon besoin de cette « vision du stratège »,
comme je l’appelais alors.
En peu de temps, j’ai trouvé un article de
presse traitant d’intelligence économique, puis j’ai
appris que le Commissariat au Plan, et, plus récemment, le député
Bernard Carayon, avaient réfléchi à la question au
niveau national. J’ai aussi découvert que plusieurs grands
groupes industriels ou économiques français commençaient
à créer des cellules d’intelligence économique.
En l’espace de quelques semaines, j’ai identifié quelques
formations et j’ai présenté ma candidature à
plusieurs d’entre elles, dont l’école de guerre économique
où je termine actuellement un mastère en stratégies
d’intelligence économique.
Ne pas écarter les applications offensives
À mon entrée à l’EGE, mon sentiment
que l’information peut être mieux exploitée et que sa
gestion peut être systématisée s’est renforcé.
Surtout, j’ai trouvé un cadre conceptuel particulier qui n’hésite
pas à rationaliser la discipline IE et l’utilisation de l’information,
aussi bien dans des applications prospectives et réactives de surveillance
et de maîtrise de l’environnement que dans des applications
offensives.
Le premier domaine dans lequel j’ai pu développer
mes connaissances est celui de l’analyse stratégique des environnements
concurrentiels. Une culture générale formée des principaux
concepts de l’intelligence économique, de la géopolitique,
de l’analyse des rapports de force et des grandes théories
stratégiques (souvent inspirées de la culture militaire)
constitue une base indispensable permettant la pratique d’une analyse
stratégique pertinente.
Par exemple, l’analyse comparée des matrices
culturelles du pays d’origine de l’entreprise et du pays où
elle souhaite développer ses activités, l’apprentissage
des théories et des cadres conceptuels principaux de l’analyse
stratégique, l’acquisition de méthodologies dans des
domaines tels que la prospection et l’évaluation des risques
(pays, marché, financiers...) sont autant d’atouts solides
pour un futur manager qui doit décider des orientations à
donner à son projet ou à son entreprise.
Acquérir la culture des systèmes
d’information
Du fait du développement spectaculaire des technologies
de l’information et de la communication, et de la profusion croissante
de l’information disponible, l’acquisition de compétences
adaptées à ces enjeux me semble incontournable. Ainsi, j’ai
appris à opérer une navigation efficace sur le Web, à
maîtriser les principales bases de données, à construire
et à administrer un site internet ainsi que l’information
et la connaissance qui y circulent. Une culture solide en matière
de systèmes d’information est tout aussi indispensable afin
de pouvoir organiser et donner une cohérence à l’information
gérée, notamment en termes de diffusion interne et de partage
des savoirs.
La gestion de l’information elle-même est
un domaine de plus en plus reconnu comme crucial dans l’activité
de l’entreprise. Ainsi, les techniques d’acquisition de sources
ouvertes, la connaissance des besoins en informations des entreprises
en fonction de leurs activités, la maîtrise des règles
juridiques d’investigation sont autant de compétences nécessaires
à la conduite d’un projet d’intelligence économique,
offensif ou non. Les techniques de management des perceptions, d’influence,
et la connaissance des pratiques de lobbying sont également des
atouts pour le décideur confronté à des environnements
de plus en plus complexes où les seules règles de la concurrence
« pure et parfaite » au sens d’Adam Smith ne sont plus
d’actualité.
La maîtrise des enjeux et des risques informationnels
est, enfin, un champ d’activités dont la valeur ajoutée
pour l’entreprise ne cesse de croître. La gestion de crise
est un des exemples les plus parlants. L’étude notamment de
la doctrine américaine de guerre de l’information, et l’adaptation
à l’entreprise de certains des concepts qui y sont développés,
fournissent au futur praticien de l’intelligence économique
des moyens d’identifier les risques et de désamorcer les menaces
pesant sur l’activité ou la pérennité de la
structure.
L’intelligence économique telle qu’elle
m’a été enseignée m’a permis d’acquérir
les compétences qu’un chef d’entreprise se doit de maîtriser
ou dont il doit disposer au sein de ses équipes pour s’assurer
de la survie et du développement de sa structure dans l’environnement
concurrentiel exacerbé qui est le nôtre.
Anticiper le risque informationnel
La discipline est nouvelle dans notre pays. Les rapports
Martre et Carayon ont le mérite de tenter de lancer le débat
au niveau national, mais il reste beaucoup à faire pour intégrer
la « culture » IE à la culture managériale française.
Beaucoup confondent encore intelligence économique et espionnage
industriel. Il existe pour l’instant assez peu d’exemples factuels
et chiffrés des gains réalisés grâce à
l’application de ces démarches. C’est pourquoi certains
arguent, comme ils l’ont fait pour le développement durable,
que l’IE est un feu de paille, une « mode » qui s’essoufflera
d’elle-même. Mais je reste persuadé que, malgré
la nouveauté du concept en France, l’IE est un outil qui lui
permettra de tenir son rang économique.
C’est pourquoi j’oriente actuellement ma recherche
d’emploi vers des entreprises françaises ou européennes
évoluant dans des secteurs auxquels la démarche d’intelligence
économique pourrait apporter un nouveau souffle : l’agroalimentaire,
les produits culturels ou de loisirs, les services aux entreprises. J’espère
à travers ma future activité pouvoir contribuer – à
mon modeste niveau – à redonner un véritable poids
mondial à une économie française confrontée
à un nouvel environnement pour lequel il lui manque encore des
armes efficaces.
http://www.constructif.fr/bibliotheque/2004-5/pourquoi-j-etudie-l-intelligence-economique.html?item_id=2569
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