est directeur de la recherche de la Cour néerlandaise d’audit.
L’évaluation en voie de devenir systématique aux Pays-Bas
Après le contrôle
budgétaire, c’est désormais l’ensemble de l’action
politique du gouvernement qui est encadrée par des règles
d’évaluation.
Aux Pays-Bas, la tradition veut
que l’évaluation de la politique économique mette fortement
l’accent sur le contrôle et la comptabilité des dépenses
gouvernementales. C’est la raison pour laquelle le ministre des Finances
jouait un rôle important en mettant à l’ordre du jour
politique à la fois les données relatives à la clôture
de l’exercice budgétaire et les rapports d’évaluation.
Dès 1971, à l’initiative
du ministre des Finances, il fut décidé que le développement
de l’analyse de l’action publique, la clôture des exercices
budgétaires et les estimations à long terme iraient de pair.
Ce fut également l’époque de la Commission pour le
développement de l’analyse de la politique publique (ou «
Coba »). Malgré cela, l’évaluation de
la politique publique ne fit pas réellement de progrès jusqu’à
la fin des années 70, où les déficits montaient en
flèche.
Vingt ans plus tard, en 1991,
le gouvernement émit l’idée que l’évaluation
devait être partie intégrante de tous les processus politiques.
Des modifications de la réglementation ont permis d’introduire
des rapports annuels dans les budgets des ministères et ont promu
des études d’évaluation par ministère, afin
de se rapprocher de cet objectif. Par la suite, l’obligation d’études
d’évaluation appropriées a été officiellement
inscrite dans la loi de comptabilité publique.
L’évaluation de la
politique publique est liée explicitement à la gestion budgétaire
et comptable fondée sur les résultats. L’objectif du
projet « Gestion budgétaire et comptable fondée sur
les résultats », qui a démarré en 1999, était
de donner aux documents budgétaires une orientation plus politique.
Au sein du gouvernement des Pays-Bas, le message est maintenant bien connu
: trois questions simples jouent un rôle central dans la gestion
budgétaire nouvelle manière : que voulons-nous réaliser,
comment allons-nous le faire et quel va en être le coût ?
La comptabilité financière rebaptisée « rapport
annuel » devra alors répondre aux trois questions suivantes
: avons-nous réalisé ce que nous souhaitions réaliser,
pour ce faire avons-nous fait ce que nous nous proposions de faire et
le coût correspondait-il à nos prévisions ?
Un nouveau cadre
Les premiers projets de budgets « nouvelle manière
» ont été présentés au Parlement lors
d’un « Prinsjesdag » ou « jour du budget
», en septembre 2001. Le premier cycle s’est terminé
le « jour de la comptabilité publique », en mai 2003,
lorsque le cabinet a présenté son « rapport annuel
du gouvernement » sur sa politique économique et sur les
résultats obtenus.
Les critiques de la Cour des comptes, ainsi que les modifications
de la loi de comptabilité publique liées au projet «
Gestion budgétaire et comptable fondée sur les résultats
», ont rendu urgente une révision de la réglementation
dans le domaine des études d’évaluation et des données
de clôture. Cette réglementation, qui constitue actuellement
le fondement de l’évaluation de la politique économique
du gouvernement central des Pays-Bas, définit deux objectifs interdépendants
:
- faire en sorte que la fonction d’évaluation soit suffisamment garantie dans le
cadre du gouvernement central,
- faire en sorte quel’information en matière de politique fournie dans le cadre
des budgets et des rapports annuels des ministères soit conforme
aux exigences de qualité s’appliquant à ce type d’informations.
Afin d’atteindre ces objectifs, la réglementation
comporte des dispositions complémentaires ayant trait aux points
suivants :
- le déploiementintégré des instruments d’évaluation,
- la pondération
nécessaire lors de l’utilisation des études d’évaluation
ex-ante,
- l’étendue de la prise en compte d’une politique par des études d’évaluationpériodiques
et leur périodicité,
- la qualité méthodologique et technique des instruments d’évaluation
et le mode d’obtention des informations ayant trait à la politique
économique,
- la manière dont les fonctionnaires et les responsables politiques sont informés
des résultats des études d’évaluation périodiques,
- les responsabilités, au sein d’un ministère, de la bonne mise en œuvre de
la réglementation.
Une « formulation optimale » des instruments d’évaluation ?
La loi de comptabilité publique exige que les
budgets et les rapports annuels des ministères contiennent des
informations sur les effets prévus et atteints des politiques économiques,
sur les initiatives entreprises à ces fins (notamment les résultats
obtenus) et sur les coûts correspondants. Dans le domaine du projet
« Gestion budgétaire et comptable fondée sur les résultats
», la plupart de ces données sont déjà automatiquement
disponibles. Malgré tout, les informations nécessaires doivent
parfois être extraites grâce à des études d’évaluation
transversales.
Les études d’évaluation jouent un
rôle complémentaire. Comment justifier les dépenses
publiques sans une vision régulière des effets qu’a
apportés cette politique ?
En ce qui concerne les systèmes d’information
de clôture régulière, la réglementation stipule
que ce sont des systèmes d’information qui donnent une idée
des coûts, de la qualité et des statistiques ayant trait
à l’efficacité ou au degré de réalisation
des objectifs de la politique.
Les études d’évaluation périodiques
peuvent se diviser en études d’évaluation ex-post et
en études d’évaluation ex-ante. Les études
d’évaluation ex-ante sont axées sur l’avenir.
Leur objectif consiste à esquisser systématiquement les
coûts, les effets souhaités et les effets indirects des décisions
politiques. Les études d’évaluation ex-post périodiques
peuvent être définies comme des études au cours desquelles
sont testées et évaluées les politiques et/ou la
gestion opérationnelle soit pendant la mise en œuvre de la
politique ou à titre rétrospectif selon les critères
de réalisation des objectifs, d’efficacité et d’adéquation.
Apporter des réponses
Les informations provenant des données régulières
et des études d’évaluation périodiques doivent
faciliter la réponse notamment aux questions suivantes :
- Quelle est la qualité des objectifs de politique économique
en tant que tels ?
- Dans quelle mesure
les objectifs de la politique économique ont-ils été
atteints ?
- Dans quelle mesure
les objectifs de la politique économique ont-ils été
atteints grâce à la mise en œuvre de la politique ?
- Les objectifs de
politique économique auraient-ils pu être réalisés
grâce à la mise en œuvre de moyens plus réduits
ou aurait-on pu obtenir des effets plus importants en mettant en œuvre
les mêmes moyens (adéquation de la politique) ?
- Quelle est l’adéquation
globale et/ou quels sont les avantages des moyens d’instrumentation
choisis ?
- Quels sont les
coûts et la qualité du pilotage et de la mise en œuvre
dans le cadre du développement de la politique économique
des produits et services fournis (adéquation de la gestion opérationnelle) ?
Faut-il mener des études d’évaluation ex-ante ?
L’objectif d’une étude d’évaluation
de ce type est de contribuer à la qualité des processus
de prise de décision concernant de nouvelles politiques ou des
modifications de politique en cours. La réglementation de 2001
stipule qu’avant une prise de décision relative à une
nouvelle politique, il convient d’analyser si la mise en œuvre
d’une étude d’évaluation ex-ante est logique
(et donc doit être menée). Elle stipule également
que ces analyses soient étayées et expliquées :
- dans les documents politiques utilisés lors des prises de décision par le Conseil
des ministres,
- dans l’explication d’une politique économique du premier exercice budgetaire
quand on peut parler d’une nouvelle politique économique et/ou d’une modification de la politique existante.
Pour être clair, s’il n’est pas obligatoire
de mettre en œuvre des études d’évaluation préalable
sur les coûts et les effets dans tous les cas de nouvelle politique
économique ou de modification de la politique économique,
il importe de bien peser l’opportunité d’utiliser une
étude d’évaluation ex-ante.
Des études d’évaluation plus fondamentales
Pour garantir que l’efficacité et l’adéquation
(l’efficacité de la dépense) de toutes les politiques
économiques puissent être évaluées régulièrement,
la réglementation de 2001 souligne le fait que toutes les politiques
économiques doivent en principe être évaluées
au moins une fois tous les cinq ans. Pour savoir si toutes les politiques
du gouvernement central doivent être soumises, le cas échéant,
à une étude d’évaluation plus approfondie, notons
que la réglementation met l’accent sur les objectifs de politique
générale qui sont inclus dans les budgets et les rapports
annuels et/ou sur les objectifs qui ont été rendus opératoires.
Les instruments d’évaluation utilisés
lors du cycle budgétaire doivent répondre à un certain
nombre de critères de qualité. Le plus important d’entre
eux est une définition cohérente et valide du système
d’information ou de l’étude d’évaluation
correspondante, ceux-ci utilisant des ins-truments de mesure fiables et
précis et tirant des conclusions d’une manière vérifiable.
Cela sous-entend que les systèmes d’information de clôture
régulière et les études d’évaluation
périodiques soient des instruments d’évaluation méthodologiquement
fiables. Ces exigences de qualité seront précisées
plus concrètement dans la nouvelle réglementation.
La nouvelle réglementation stipule que les fonctionnaires
et les responsables politiques devront être informés des
résultats des études d’évaluation périodiques
conformément à une procédure normalisée. La
nature exacte de cette procédure normalisée a néanmoins
été laissée à l’appréciation des
ministères eux-mêmes et ce, de manière délibérée.
Ces ministères sont obligés de définir par écrit
la procédure normalisée. Après tout, les différentes
responsabilités doivent apparaître clairement. Si l’on
veut avoir des chances raisonnables d’utiliser les résultats
des études d’évaluation, il faut que la procédure
normalisée soit en phase avec les cycles de budgétisation,
de planification et de contrôle du ministère.
L’évaluation de l’action du gouvernement
central des Pays-Bas sera plus performante encore à l’avenir
grâce à :
- l’amélioration de l’intranet interministériel,
- le développement d’études d’évaluation moins nombreuses mais de
meilleure qualité, une attention portée aux coûts, une programmation transversale des études d’évaluation,
- La modernisation de la méthodologie : évaluation qualitative et participative
de la politique venant en complément d’études d’évaluation qui mesurent, décrivent et évaluent…
http://www.constructif.fr/bibliotheque/2004-5/l-evaluation-en-voie-de-devenir-systematique-aux-pays-bas.html?item_id=2558
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