Politique de la ville : une mutation à parachever
L'avenir de la politique de la ville passe par l'amplification des politiques d'emploi, d'éducation et de développement économique, qui sont les piliers de l'action publique dans les 490 quartiers où la rénovation urbaine a entraîné une transformation en profondeur.
L'Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru), avec ses partenaires nationaux, peut se prévaloir d'un vrai bilan qui repose sur des résultats chiffrés, mais aussi sur des succès tangibles incontestables. L'Anru mène actuellement 490 projets de rénovation dans 385 villes qui se traduisent par plusieurs dizaines de milliers de chantiers : construction de logements individuels ou collectifs en accession sociale, établissements scolaires, crèches, pôles d'activités culturelles et sportives, centres sociaux, commerces, réhabilitation de logements et d'équipements, de centres commerciaux... Son champ d'intervention est très vaste. Avec un objectif majeur : améliorer le cadre de vie de près de 4 millions d'habitants.
L'un des principaux enjeux du Programme national de rénovation urbaine est de redonner attrait et valeur aux quartiers, de favoriser leur inscription dans la ville, de répondre aux attentes des habitants et à leurs besoins en termes d'habitat et d'accès aux services et à l'emploi, et de faciliter l'accès à la propriété. Mais une fois les étapes de la concrétisation des projets franchies, élus, collectivités, bailleurs, représentants des délégations territoriales et équipes de l'Anru, tous mesurent qu'il serait coupable de relâcher leur engagement, leur attention. Tous sont animés par une conviction très forte : il faut parachever la mutation engagée et en garantir la pérennité.
Poursuivre les efforts engagés
L'État et les pouvoirs publics sont unanimement convaincus de la nécessité d'écrire l'acte 2 de la rénovation urbaine. Les choses ne peuvent pas rester là où elles en sont aujourd'hui. Cet immense programme lancé en 2003 par le gouvernement, fortement soutenu par les partenaires sociaux et d'une ampleur en moyens humains et financiers et en force de mobilisation de l'ensemble des acteurs publics jamais atteints jusqu'à aujourd'hui, a fait naître des espoirs énormes que nous nous devons de faire nôtres.
La rénovation urbaine non seulement a changé l'image des quartiers, mais elle a repoussé les limites de chacun. Les habitants ont retrouvé d'autres habitudes, ont recréé des relations de voisinage, repris confiance pour mener des projets personnels auxquels ils n'osaient plus croire. Les bailleurs ont, quant à eux, repensé leur organisation et leurs modalités d'intervention et de gestion. Les collectivités se sont appropriées des espaces, ont réintégré des quartiers entiers dans la vie de la cité.
L'Anru elle-même a élargi ses missions aux quartiers anciens dégradés et réinterrogé le modèle économique et opérationnel, qui doit explorer des voies plus audacieuses, initier davantage de créations de richesses et d'emploi, s'ouvrir aux initiatives privées.
Relever le défi du développement économique
La composante économique, qui n'a pas toujours été prise en compte dans les premières expressions de la rénovation urbaine, s'annonce comme le prochain défi du renouveau des quartiers. Le développement économique ne peut pas demeurer le parent pauvre des projets de rénovation. L'Anru et la Caisse des dépôts ont ainsi lancé l'an dernier une réflexion afin d'identifier la manière de mobiliser davantage l'ensemble des acteurs. Il est en effet essentiel d'agir tous ensemble pour apporter de l'activité et des emplois dans les quartiers populaires.
Même si les clauses d'insertion des opérations inscrites dans les marchés de travaux des projets de rénovation urbaine se sont largement généralisées, avec d'excellents chiffres dont peuvent s'enorgueillir certains territoires et les acteurs locaux, parmi lesquels au premier chef les entreprises de BTP, il faut aller plus loin. La charte nationale d'insertion a vocation à offrir aux habitants la possibilité de bénéficier pleinement des investissements réalisés sur leurs quartiers et, surtout, de les aider à retrouver une vraie place dans la cité. Un processus doit s'enclencher. Il doit aller bien au-delà du cadre du projet de rénovation urbaine, afin d'offrir de véritables parcours professionnels aux personnes les plus éloignées de l'emploi.
C'est en amenant des entreprises dans les quartiers que nous créerons une spirale vertueuse alliant qualité de vie et activité. Alors que 20 % des opérations arrivent à leur terme cet été, il est important de dresser un premier bilan portant précisément sur ce volet économique. Pas question d'imposer une recette miracle, chaque situation étant spécifique. Mais il faut faire connaître toutes les initiatives positives afin que d'autres puissent s'en inspirer.
Les acteurs économiques commencent à percevoir la rénovation urbaine comme une formidable opportunité d'investissement. Cela nécessite beaucoup de travail, une méthode rigoureuse, et surtout une action concertée de l'ensemble des forces vives.
Mener une politique multifacettes
Il est capital que ce souffle nouveau apporté par la rénovation urbaine imprègne toutes les facettes de la politique de la ville : les actions spécifiques conduites par l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances (Acsé), mais aussi les actions de droit commun, comme je l'ai préconisé dans un rapport établi avec le sénateur Pierre André, rapport remis en 2009 au Premier ministre, en privilégiant la coordination des initiatives et des moyens, en évitant le saupoudrage.
Il nous faut également ne pas craindre d'affronter les questions liées à l'éducation, à la santé, à la prévention de la délinquance. Selon moi, il n'existe pas de fatalité liée à l'histoire de ces quartiers et au vécu de leurs habitants : il est possible d'y faire baisser la délinquance, d'y ramener de l'activité, de lutter contre l'échec scolaire, notamment grâce au programme des internats d'excellence dont la mise en œuvre a été confiée à l'Anru. Ce programme crée un véritable espoir pour les jeunes, qui aujourd'hui peuvent accéder aux meilleurs établissements, aux meilleures études, aux formations diplômantes.
Je crois à la force de l'accompagnement des populations qui en ont le plus besoin. Mais accompagnement ne signifie pas assistanat. Il signifie au contraire responsabilisation, respect des engagements, de même que l'on attend de chacun qu'il respecte les siens, qu'il s'agisse des habitants, des élus, des pouvoirs publics, des bailleurs, des partenaires sociaux, des chefs d'entreprise...
Nous sommes tous parties prenantes de l'avenir de la rénovation urbaine dans ses développements humains et économiques ainsi que de la poursuite de ce programme national qui a déjà fait émerger tant de talents.
Nous sommes tous décidés à écrire ensemble une nouvelle histoire de la politique de la ville, sans tabous, sans idées reçues et avec confiance.
http://www.constructif.fr/bibliotheque/2011-6/politique-de-la-ville-une-mutation-a-parachever.html?item_id=3100
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