Gérard HAMEL

Maire de Dreux.

© Philippe Baudouin

Alain BETHFORT

est président du Conseil de l’artisanat de la FFB et de l’UNA CGPME.

Partage

Les réactions des élus et des professionnels

Alain Bethfort « Les PPP ne peuvent pas être la panacée »

Il ne faut pas surestimer l'importance des partenariats public-privé dans l'immobilier, ni négliger leur apport. En veillant à ce qu'ils financent de bons projets de toutes tailles et bénéficient ainsi aux grandes comme aux petites entreprises et avec les mêmes garanties.

Selon l'enquête réalisée par le Centre d'expertise français pour l'observation des partenariats public-privé (CEF-O-PPP), les contrats de partenariat, baux emphytéotiques hospitaliers, baux emphytéotiques administratifs, autorisations d'occupation temporaire du domaine couplées à une location avec option d'achat, rassemblent 541 opérations lancées sur tout le territoire entre le 1er janvier 2004 et le 30 décembre 2010, pour 202 opérations attribuées. Le montant total des marchés associés s'élève, au minimum, à 12,3 milliards d'euros sur sept ans.

Dans cet ensemble, l'immobilier compte pour 341 projets proposés et 50 opérations attribuées, pour un montant global de 4,2 milliards d'euros sur sept ans, soit environ 601 millions d'euros par an en moyenne, à rapprocher des 30 milliards d'euros annuels de la commande publique.

Les PPP ne peuvent pas être considérés comme la panacée. C'était déjà vrai pendant la période faste des années 2000, ça l'est encore plus aujourd'hui. Néanmoins, ils permettent de faire sortir des opérations qui n'auraient pas vu le jour autrement. Du point de vue des entreprises artisanales, qui vont certes intervenir en sous-traitance, il s'agit de travaux en plus. Il serait par conséquent dommage de se priver de cet instrument.

Des améliorations nécessaires

Toutefois, deux réserves me semblent devoir être apportées.

Premièrement, il faut que les projets ainsi financés ne soient pas des « canards boiteux », dont ni l'utilité réelle, ni le modèle économique ne tiennent la route.

Deuxièmement, il conviendrait que les PPP ne soient pas réservés aux seules opérations d'envergure nationale et aux seules entreprises de grande taille. Grâce aux BEA et aux AOT, certaines PME ont pu, au cours de ces dernières années, prendre leur part dans ces montages. Il faut que cela se poursuive et les propositions de la FFB s'inscrivent bien dans ce sens.

Enfin, il faut insister sur le fait que les sous-traitants doivent bénéficier des mêmes conditions d'exécution (garanties et délais de paiement, indexation des prix, etc.) quel que soit le mode de passation des marchés, PPP compris. C'est indispensable si l'on souhaite éviter des levées de bouclier parfois justifiées.

Gérard Hamel « Nous devons faire des efforts de gestion »

Le changement d'attitude des banques vis-à-vis des collectivités, à un moment où celles-ci ne peuvent pas accroître la pression fiscale sur leurs habitants, doit déboucher sur des efforts de gestion renouvelés de la part des élus.

Jusqu'à l'année dernière, les choses étaient relativement simples pour nos collectivités. Nous votions nos budgets à la fois en fonctionnement et en investissement et nous nous retournions vers les banques, en les mettant en concurrence - quelle époque heureuse ! -, afin de choisir la meilleure offre pour satisfaire nos besoins en financement.

Ce n'est plus le cas. Depuis cette année, bien que nous ayons adopté des budgets prudents et réduit nos investissements, nous nous retournons vers les banques pour leur demander : « Que pouvez-vous nous financer dans les investissements que nous avons prévus ? » Aujourd'hui, en effet, les banques nous observent avec un œil nouveau et demandent à regarder d'un peu plus près, - ça c'est nouveau ! - les ratios de gestion de nos collectivités.

Nouvelle approche des banques

Ce changement d'approche bancaire va avoir des répercussions sur le démarrage de nos travaux d'investissement, en attendant que l'on puisse produire nos comptes administratifs afin de permettre aux banques de les examiner (les banques au pluriel, car elle est aussi finie l'époque où une banque seule, compte tenu du relationnel que l'on pouvait avoir avec elle, répondait aux besoins de la collectivité). Pire encore, la banque ne se contentera pas de regarder le besoin de la ville, de la collectivité : elle sait pertinemment aussi que la communauté de communes ou d'agglomérations va faire des investissements, que tout ça est une espèce de château de cartes qui fait que, si l'on n'englobe pas le besoin total d'investissement de la collectivité, on n'a pas une véritable vision du besoin.

Aujourd'hui, en mars, je ne peux pas dire combien ma commune pourra avoir de crédits lui permettant de lancer les investissements prévus en 2012. Pourquoi ? Parce que je n'ai pas pu encore fournir tous les documents demandés par les banques qui se constituent en « pool », en disant : « De toutes façons, on ne répondra pas seules, on ne prendra plus seules le risque de vous prêter ». Résultat : nous n'arrivons pas à lancer nos travaux et investissements prévus pour 2012, alors pourtant qu'ils sont en diminution.

Transparence accrue des collectivités

 Aujourd'hui, les banques regardent des ratios de fonctionnement qu'elles n'analysaient pas auparavant, et on peut penser que les agences de notation qui agissent sur le plan des États - voire d'autres agences -, donneront leur avis demain sur les gestions communales. L'obligation que je vois poindre pour les collectivités, c'est une plus grande transparence de leur gestion via des ratios de fonctionnement et d'endettement. Or, comment peut-on compter aujourd'hui sur des recettes complémentaires qui seraient directement liées à des hausses de fiscalité, alors qu'on sait pertinemment que le pouvoir d'achat moyen des Français est déjà très atteint ? Notre problème d'investissement local ne peut donc pas être résolu uniquement par des hausses de fiscalité mais peut-être, plus intelligemment, par une meilleure gestion de nos collectivités. Il faut vraiment que nous fassions des efforts sur nos dépenses de fonctionnement, et puis, peut-être, que nos habitants considèrent qu'il y a un niveau de service qu'il n'est pas nécessaire de dépasser. Le « toujours plus » me semble fini.

http://www.constructif.fr/bibliotheque/2012-3/les-reactions-des-elus-et-des-professionnels.html?item_id=3168
© Constructif
Imprimer Envoyer par mail Réagir à l'article