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Les propositions de la FFB

1. Stabiliser le cadre juridique et fiscal et ne pas casser ce qui marche.
2. Mettre fin à l'empilement désordonné des réglementations s'appliquant au cadre bâti.

Le dynamisme démographique français ainsi que la nécessaire prise en compte du développement durable et de l'accessibilité du cadre bâti ont un impact qui va bien au-delà des exercices de projection proposés pour le logement. Le parc non résidentiel est tout aussi concerné, avec :

  • pour le facteur démographique, le développement des besoins en matière de crèches, écoles, collèges, lycées, locaux universitaires, mais aussi de bureaux, ateliers, équipements sportifs et culturels, etc. ;
  • pour les facteurs « développement durable », une approche spécifique, liée à des modes d'occupation et d'usage très divers (de la salle des marchés en fonctionnement continuel à la salle d'opération, à usage moins intensif, mais productrice de déchets biologiques très polluants, en passant par les locaux de stockage banalisés) et, d'ores et déjà, l'amorce d'une modification des exigences de la demande au profit des biens de haut standard environnemental, processus classique dit de « fuite vers la qualité » qui marque chaque rupture.

Ces investissements, tant en neuf qu'en rénovation, sont clairement facteurs de croissance. C'est notamment le cas par l'effet induit sur l'emploi, puisqu'on estime que 95 000 euros de travaux HT permettent de financer l'activité d'un salarié du bâtiment et de 0,4 à 0,6 salarié en amont de la filière pendant une année.

Ces investissements sont aussi conditionnés par la croissance et par les perspectives des investisseurs potentiels en la matière. De fait, toute embellie économique attendue et, plus encore, confirmée, génère des créations d'emplois, donc une demande en bureaux, en ateliers et en bâtiments industriels, en locaux de stockage, en bâtiments commerciaux, etc.

De plus, au plan international, le marché immobilier non résidentiel français reste porteur pour les investisseurs, grâce à de solides fondamentaux. C'est un marché diversifié en termes de localisation (plusieurs villes offrent de bons rendements immobiliers) et d'actifs de qualité (bureaux, commerces et hôtels de luxe). Sa taille et sa profondeur sont autant d'atouts qui en font une des principales places où investir.

Toutefois, dans un contexte de crise économique et financière aiguë et durable, de durcissement des règles fiscales et de mesures réglementaires contraignantes (Solvabilité II, Bâle III, directive Alternative Investment Fund Managers - AIFM -, normes IFRS), le risque d'un retrait partiel ou total des financeurs et de certains investisseurs n'est pas à écarter. Et pour cause : c'est un placement de long terme, lourd, moins liquide que d'autres, qui connaît des cycles, dans des biens par nature localisés et non homogènes, ce qui leur confère des avantages mais aussi des inconvénients, notamment une certaine opacité des marchés.

Au-delà du problème de l'environnement financier, commun à tous les marchés immobiliers, il est de la plus extrême importance que l'environnement fiscal et légal du marché du non-résidentiel soit le plus adapté et le plus attractif possible. Toute évolution sur un de ces paramètres peut influencer le flux de revenus locatifs et, par là même, la valeur future de l'actif. De ce point de vue, le risque immobilier s'avère particulièrement élevé (cf. le nombre de réformes opérées au cours d'un passé récent) et difficile à mesurer.

C'est pourquoi la FFB demande que le cadre juridique et fiscal applicable au marché non résidentiel privé soit stabilisé, en s'inspirant des produits qui ont témoigné de leur efficacité par le passé. Elle milite aussi pour que cesse l'empilement désordonné des réglementations techniques s'appliquant au cadre bâti, afin que les entreprises puissent à l'avenir disposer du temps nécessaire pour bien intégrer les nombreuses règles nouvelles entrées en vigueur.

Stabiliser le cadre juridique et fiscal

En matière d'investissement non résidentiel privé, la mise en place, en 2003, du régime des sociétés d'investissement immobilier cotées (SIIC) et la relative stabilité des règles juridiques et fiscales les concernant, a permis un fort développement du marché français. Ainsi, comme le montrent les travaux réalisés dans le cadre du Livre blanc de l'innovation dans l'immobilier du Pôle Finance Innovation et de l'Institut de l'épargne immobilière et foncière :

  • le nombre de sociétés, hors SIIC paneuropéennes, est passé de 10 en janvier 2003 à 45 en juin 2010 ;
  • la capitalisation boursière a été portée de 11,13 milliards d'euros en 2003 à 42,26 milliards d'euros en 2010, soit respectivement 1,21 % et 3,38 % du total de la cotation à Paris ;
  • le total des fonds propres collectés entre 2003 et le 30 juillet 2010 avoisine les 15 milliards d'euros (14,80 milliards d'euros exactement). Pour la seule année 2007, l'émission de nouveaux fonds propres en France a représenté plus de la moitié de l'ensemble de l'activité en Europe ;
  • l'exit tax payée à l'État par les SIIC (c'est-à-dire le complément de recettes) représente un total de 2,5 milliards d'euros de 2003 à juillet 2010. Cette somme n'inclut pas les autres impôts payés par les actionnaires, les droits de mutation, etc. ;
  • l'investissement (travaux et construction neuve) des SIIC, hors SIIC paneuropéennes, totalise 13,7 milliards d'euros pour la période 2001-2009. Sur la même période, les acquisitions avoisinent 36,9 milliards d'euros.

En d'autres termes, les SIIC ont largement contribué au dynamisme de l'ensemble des marchés et, par là même, influé positivement sur la croissance de l'économie française.

En moins de dix ans, ce régime est donc devenu l'un des moteurs essentiels des marchés immobiliers français et de la croissance. À tel point qu'il a été largement copié dans beaucoup de pays européens (Royaume-Uni, Allemagne, Italie, Finlande, Espagne). Il a donc servi de déclencheur et de révélateur de l'utilité économique et industrielle de ce type de véhicule d'investissement.

Reste que, pour les pouvoirs publics, la tentation est grande de modifier les régimes fiscaux en situation de disette budgétaire. Les débats furent d'ailleurs vifs à l'occasion du vote de la loi de finances pour 2012 et des divers plans d'économie de l'automne 2011. Les véhicules d'investissement, cotés ou non, en faveur de l'immobilier s'inscrivent parmi les cibles d'autant plus évidentes qu'on peut en espérer, à court terme, une grande « rentabilité fiscale », rançon de leur succès.

A contrario de ce raisonnement et dans une logique de long terme, la FFB demande donc une stabilisation du cadre juridique et fiscal applicable aux placements immobiliers, notamment en ce qui concerne le non-résidentiel. L'objectif du prochain gouvernement doit bien être de ne pas casser ce qui marche et ce qui permet aussi à la France d'occuper une bonne place en termes de concurrence internationale, grâce une présence d'équipements productifs bien répartis sur le territoire.

À cet égard, la FFB demande aussi instamment que la réforme des règles prudentielles s'appliquant au monde de l'assurance (Solvabilité II) ne se solde pas par une pénalisation de l'immobilier. Or, dans les textes actuellement en débat, les foncières cotées risquent de pâtir de la pondération applicable aux actions, alors même que leur spécificité devrait être prise en compte. Dans un autre registre, le calcul des fonds propres se faisant sur l'actif net, toute augmentation de la dette réduit à la fois l'actif net et le ratio de fonds propres appliqué. Les véhicules immobiliers structurellement peu endettés, comme les SCPI, risquent donc d'être pénalisés, résultats qui iraient à l'encontre de l'objectif du régulateur.

D'une manière générale, dans la continuité du rapport déjà cité, la FFB milite pour le maintien de la coexistence des deux familles (OCPI et SCPI) 1 de véhicules non cotés. Cette coexistence constitue un atout indéniable, même s'il convient d'envisager des réformes à la marge sur tel ou tel aspect des dispositifs.

Mettre fin à l'empilement

En accompagnement de la croissance économique et de l'effort d'amélioration du parc de bâtiments, les années 2000 ont été propices à la multiplication de nouvelles réglementations techniques et au durcissement de celles qui existaient déjà. Pour n'en citer que quelques-unes, on peut évoquer :

  • les réglementations thermiques (RT 2000, 2005, 2010 puis 2012, ou bien les normes bâtiment basse consommation - BBC - qui deviennent progressivement obligatoires pour tous les bâtiments, et bâtiment à énergie positive - Bepos) ;
  • la réglementation relative à l'accessibilité ;
  • la réglementation acoustique ;
  • la réglementation parasismique ;
  • la réglementation incendie ;
  • les réglementations visant à limiter l'exposition des populations aux termites, à l'amiante, au plomb ou au radon ;
  • les nouvelles obligations relatives à la gestion des déchets de chantier.

Il faut ajouter à ce panel la féconde production de règles d'urbanisme ou de construction (même si une norme ascenseur a été annulée de justesse en 2010), tant au plan national que local, de réglementations sanitaires ou bien encore d'exigences en matière de formation des salariés du bâtiment (le risque d'exposition à l'amiante en ayant été le dernier avatar en date).

Chacune de ces exigences relève d'objectifs parfaitement légitimes et qui répondent à de véritables préoccupations sociétales. Toutefois, leur empilement dans un si bref délai génère une complexité extrême et des surcoûts de production pour les biens immobiliers qui, une fois additionnés, finissent par peser lourdement sur les prix. Or, l'évaluation économique préalable, qui devrait être la norme, n'est souvent pas réalisée ou pas de façon sérieuse. Dans certains cas, la conjugaison de ces règles s'avère même techniquement impossible.

De plus, l'approche en « cycle de vie », tout à fait incontestable d'un point de vue théorique et qui permet d'amortir sur le très long terme le coût initial d'un investissement, bute sur l'horizon réel des investisseurs. Pour ce qui concerne l'immobilier non résidentiel, qu'il s'agisse d'un investissement à des fins d'occupation personnelle ou de location, même dans le cas de la construction neuve ou d'une rénovation lourde, les temps de retour attendus n'excèdent guère une dizaine d'années au mieux. Et ils sont beaucoup moins importants dans certains segments de marché comme les commerces.

Enfin, cette multiplication rapide des réglementations est une inépuisable source de contentieux, dans un secteur qui n'en manque pas par ailleurs.

C'est pourquoi la FFB demande que soit mis fin à l'empilement désordonné des réglementations techniques s'appliquant au cadre bâti 2.

Il est indispensable que la production normative intègre que les investisseurs, les maîtres d'ouvrage, les maîtres d'œuvre ainsi que les entreprises de construction ont besoin de temps pour s'approprier toute nouvelle réglementation ou tout durcissement de la réglementation, surtout si de telles nouveautés se cumulent à rythme rapide, comme ce fut le cas au cours des dernières années. Ce temps d'apprentissage est d'autant plus nécessaire qu'il conditionne les éventuelles économies d'échelle dans la filière du bâtiment - industriels compris - mais aussi l'indispensable maîtrise des coûts de production, dans un contexte financier qui ne permet plus d'absorber d'importantes hausses en ce domaine.

Il s'agit également de détecter les cas d'incompatibilités techniques manifestes, qui conduisent à des impossibilités de construire, et de les analyser en détail afin de permettre aux pouvoirs publics, élus et administration, de trancher si nécessaire entre différentes options.

Enfin, la FFB demande qu'à l'avenir, la mise en place de toute nouvelle réglementation technique ou urbanistique s'appliquant au bâtiment soit véritablement conditionnée par une évaluation préalable sérieuse qui en garantisse le caractère économiquement soutenable.

  1. Organisme de placement collectif immobilier et société civile de placement immobilier
  2. La demande vaut également pour le résidentiel.
http://www.constructif.fr/bibliotheque/2012-3/les-propositions-de-la-ffb.html?item_id=3158
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