est vice-président de la Fondation tripartite pour la formation dans l'emploi et de Confemetal (Confédération espagnole des syndicats d'entrepreneurs du métal).
Espagne : une réforme en profondeur
Le législateur vient
d’introduire un nouveau système global de formation professionnelle,
qualifications et certifications.
Pour comprendre l'évolution
du système de formation continue depuis sa création jusqu'à
sa récente réforme, il est nécessaire de connaître
le contexte, pendant la dernière décennie, du Système
national de formation professionnelle qui rassemble trois sous-systèmes : la formation professionnelle d'insertion des jeunes dans la vie active,
la formation professionnelle des demandeurs d'emploi et la formation professionnelle
continue des salariés.
Une loi sur les qualifications et la formation
professionnelle
Dans les années 1990, les deux programmes nationaux
de formation professionnelle qui ont dessiné la politique de formation,
reflétaient le consensus existant sur le besoin de fusionner ces
trois sous-systèmes. Leur diversité n’était
pas adaptée à la nécessité de promouvoir la
formation tout au long de la vie. Ce scénario a abouti en 2002
à la loi sur les qualifications et la formation professionnelle
qui met en place un système global de formation professionnelle,
qualifications et certifications dont l'instrument central est le Système
national des qualifications. Ce système repose sur un Répertoire
national des qualifications professionnelles, qui rassemblera les qualifications
identifiées dans le système productif et leur formation
correspondante, ainsi qu'une procédure de validation et d'enregistrement
de celles-ci. Le Répertoire deviendra un référent
obligatoire pour l'ensemble de la formation professionnelle.
Les années 1990 ont été, en outre,
le point de départ de la formation continue. En 1992, les organisations
patronales CEOE et Cepyme et les syndicats de salariés UGT et CCOO
ont signé le premier accord national de formation continue, qui
a été complété par un accord tripartite (le
syndicat CIG a ensuite adhéré à ce premier accord).
C'est là l'origine du sous-système de formation continue.
Un point de départ parce que, jusqu'en 1992, il
n'y avait pratiquement pas de formation continue dans les entreprises
; alors qu'elle faisait partie d'un programme d'aides pour la formation
de la population active, celle-ci n'existait pas en tant que sous-système
de formation spécifique. Seules les grandes entreprises dotées
de moyens économiques et d’une tradition de formation organisaient
de la formation continue, les autres entreprises n'en faisaient pas, sauf
quelques exceptions. De plus, lorsque des actions de formation continue
avaient lieu, elles intervenaient dans le cadre de changements technologiques
ou d'autres changements ponctuels au sein de l'entreprise.
Un mode de gestion paritaire jusqu’en 2001
C'est ainsi que les premiers accords nationaux de formation
continue ont répondu au besoin de générer une culture
de la formation dans l'entreprise. Depuis 1993, le sous-système
de formation gère et distribue des aides pour former les salariés.
Ce rôle a été confié à la Fondation
pour la formation continue (Forcem) dont les fonds proviennent en partie
des sommes collectées au titre de la contribution de formation
professionnelle versée par les entreprises et les salariés,
du FSE et de subventions spécifiques de l'Institut national du
Travail.
Tout le sous-système a été conçu
autour de la négociation collective, donnant naissance à
un mode de gestion qui est resté, jusqu'en 2001, paritaire. Impulser
la formation continue semblait devoir faire appel, et c'est ce que nous
avons constaté après près de dix ans, à la
participation active et à la concertation des entreprises et des
salariés ainsi que des organisations, de branche ou territoriales,
qui les représentent. Ce fort caractère participatif a été
un élément clé pour obtenir l'adhésion à
la formation d'un très grand nombre d'acteurs qui ont réussi
à la faire entrer dans tous les secteurs, territoires et types
d'entreprise.
Les quatre premières années de gestion
ont été très positives, surtout si l'on se souvient
que nous avons connu alors une période de récession économique.
Entre 1993 et 1996, le nombre de participants à des plans de formation
financés par le système a été multiplié
par quatre, avec la création de commissions paritaires de formation
dans pratiquement toutes les branches et territoires. Une situation très
favorable pour entreprendre, en 1996, la réforme des Accords nationaux
de formation continue.
Un élargissement du champ des bénéficiaires
À cette occasion, plusieurs changements ont été
introduits. Le plus significatif a été l'élargissement
des aides à des groupes sociaux très importants pour notre
économie, tels que les artisans et les salariés du secteur
agricole (REASS) qui se sont parfaitement intégrés dans
le système de la formation. Jusqu'en 2001, ce sont 390 925 artisans
et 252 983 salariés de l'agriculture qui sont venus grossir le
nombre total de stagiaires de cette période.
Les grands changements, plus précisément
dans le mode de gestion du sous-système, sont intervenus en 2000
lors de la dernière réforme des accords nationaux de formation
continue. La tendance à la fusion qui dominait la scène
de la formation professionnelle et ses liens de plus en plus forts avec
la politique de l'emploi, ont encouragé une reflexion globale qui
a ouvert les portes du sous-système aux services de l'État.
La gestion est devenue tripartite, avec la création de la Fondation
tripartite pour la formation dans l'emploi qui, actuellement, est chargée
de la régulation et de la gestion.
Deux changements majeurs
Mais, depuis 2000, deux événements d'extraordinaire
importance se sont produits : d'une part, la loi sur les qualifications
et la formation professionnelle, et, d'autre part, deux décisions
du Tribunal constitutionnel qui stipulent que les communautés autonomes
doivent intervenir dans la gestion de la formation continue. Ainsi, la
formation continue devra s'adapter au Système national de qualifications
et sa gestion devra se conformer aux champs de compétences en vigueur
dans notre pays. Ces deux points sont précisés dans le décret
royal 1046/2003, qui régira le sous-système de formation
continue à partir du 1er janvier 2004.
Ce décret n'introduit pas seulement un nouveau
mode de gestion, il introduit également un nouveau mode d'attribution
des aides. Le premier prendra forme dans la Fondation de l'État
pour la formation dans l'emploi à laquelle participeront les communautés
autonomes.
Participants certifiés dans le sous-système
de la formation continue (1993-2001)

Le nouveau mode d'attribution reposera
sur un système d'imputations permettant aux entreprises qui formeront
leurs salariés de déduire de leurs contributions les coûts
de formation. Ces possibilités d'imputation seront inversement
proportionnelles à la taille de l'entreprise. Outre les imputations,
le décret prévoit que des organisations d'employeurs et
de salariés ainsi que des associations pourront conclure des conventions
leurs permettant de faire des offres de formation directement aux salariés.1
À ce stade, nous sommes certains que la création
du système d'aides à la formation a été positive,
cette activité étant devenue habituelle, systématique
et régulière pour un grand nombre d'entreprises et de salariés.
Il est également normal que, après dix ans d'expérience,
le sous-système évolue et cherche des alternatives qui lui
confèrent une plus grande efficacité.
Le sous-système a démarré en 1993
avec une forte vocation de service aux entreprises et aux salariés
qui s'est traduite par la simplicité des procédures d'accès
aux aides. Au fur et à mesure de l'augmentation des volumes à
gérer et des aides attribuées, le renforcement des contrôles
est devenu nécessaire.
La conséquence a été, bien que le
contrôle très rigoureux qu'exige la gestion de fonds publics
soit légitime, que ses procédures se sont bureaucratisées
au point qu'il est probable qu'elles sont en train de faire obstacle au
bon déroulement de la formation et à la flexibilité
nécessaire pour les démarches formatives de l'entreprise.
C'est, à l'heure actuelle, l'un des grands défauts que le
nouveau système devra corriger.
Inclure les PME...
L'un des objectifs essentiels des accords nationaux était
d'inclure les PME dans les démarches de formation. Nous pouvons
affirmer aujourd'hui que cet objectif est devenu une réalité
car, entre 1996 et 2000, le taux de formation des entreprises de moins
de 200 salariés a augmenté de 3 points. Pendant l'année
2000, 9,5 % de ces entreprises ont participé aux plans de formation
financés par le système. Cependant, même si ces données
sont positives, ce progrès n'est pas suffisant pour un pays dans
lequel la presque totalité des entreprises (99 %) sont des PME.
Il est certain qu'il existe entre elles de très grandes différences.
Leur taux de formation varie entre 40% pour les entreprises de 50 à
199 salariés et 5,5 % pour les entreprises de 1 à 5 salariés.
Ce sont justement celles-ci qui constituent l'un des grands défis
pour les nouvelles modalités. Les mesures prévues sont,
entre autres, la création de crédits d'imputation qui pourront
être supérieurs aux contributions au titre de la formation
professionnelle et la non-obligation de cofinancer la formation.
... et les femmes
Par ailleurs, l'évolution de la participation
des femmes dans des actions de formation continue est extrêmement
positive. Leur pourcentage au sein du nombre total de stagiaires du sous-système
a augmenté de 15 points depuis 1994 et a atteint 42 % en 2001,
7 points de plus que leur part dans l'ensemble de la population active
du secteur privé.
Evolution de la participation féminine
dans le sous-système (1994-2001)

À notre sens, l'un des éléments
les plus intéressants à développer dans le futur
est la formation à distance. Le sous-système devrait être
la piste de décollage de cette modalité qui peut être
extrêmement fructueuse pour impulser la formation dans les entreprises
et qui est actuellement utilisée par plus de 7 % des entreprises
de plus de 200 salariés.
En conclusion, de nombreuses et grandes avancées
ont été obtenues pendant les dix années de vie du
sous-système. Cependant, beaucoup de travail reste encore à
faire pour améliorer l'efficacité de la formation continue
et la rendre plus accessible.
- Il faut préciser qu'au moment de la rédaction de cet article les arrêtés ministériels concernant ces nouvelles modalités sont encore en préparation. Cependant, nous espérons que l'approfondissement
de la culture de formation continue se poursuivra contribuant à matérialiser l'apprentissage permanent de la population active.
http://www.constructif.fr/bibliotheque/2004-1/espagne-une-reforme-en-profondeur.html?item_id=2530
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