est membre du Conseil général des Ponts et Chaussées, président de l’association HQE (Haute qualité environnementale), et président de la commission qualité environnementale des produits de construction et des bâtiments de l’Afnor.
Une démarche de progrès pour le Bâtiment
Le développement durable
est un mode d’animation d’une activité permettant progressivement
de prendre en compte de nouveaux enjeux, et de leur apporter des réponses
appropriées au contexte, y compris celui du Bâtiment.
Dans les entreprises, on connaît
bien la démarche d’assurance de la qualité, et sa traduction
en normes internationales de la famille Iso 9000. Il s’agit de se
mettre en situation de satisfaire à la fois l’actionnaire,
le client et l’employé. Trois cibles dont les intérêts
à court terme peuvent être divergents, ce qui suppose d’avoir
la ferme volonté de surmonter les contradictions qui ne manqueront
pas d’apparaître. Concept universel, traduit en normes elles-mêmes
universelles, la démarche « qualité » se transpose
dans les différents domaines d’activité, grâce
à des procédures adaptées et autres guides de lecture.
Un concept universel
Le développement durable
relève de la même logique : concept universel concernant
toutes les activités humaines, d’amélioration continue
permettant la prise en compte simultanée de nombreux paramètres,
dans l’objectif de dépasser les contradictions.
Il faut le dire clairement : il
n’y a pas de développement durable dans l’absolu, comme
un état de grâce. C’est un effort permanent, à
produire à partir d’une situation donnée, que l’on
cherche à améliorer en continu. C’est en quelque sorte
une «démarche qualité» étendue aux enjeux
collectifs et au long terme, sans négliger pour autant, bien entendu,
les enjeux personnels et immédiats.
Les enjeux à intégrer
sont souvent cités quand on parle du développement durable,
avec les trois « piliers » économique, social et environnemental.
La dimension culturelle est aujourd’hui mise en avant, comme un quatrième
pilier. Au-delà de leur nombre, ce qui compte, c’est de considérer
les différentes facettes d’un projet comme autant de composantes
à améliorer, au lieu de se concentrer sur l’une d’elles
dont la progression pourrait se faire au détriment des autres.
L’exemple de la construction traditionnelle
Cette intégration se faisait
spontanément dans la construction traditionnelle, avec des techniques
stabilisées mais remarquables par l’ingéniosité
et le talent qu’elles exigeaient.
Une maison traditionnelle en Savoie
: implantation à l’abri des vents les plus violents et des
avalanches, façade et ouvertures au sud, réserves de bois
au nord, disposition des pièces de manière à bénéficier
de la chaleur des animaux, choix et préparation des matériaux
locaux, pierre et bois, etc. : ingéniosité, adaptation aux
contraintes du site, valorisation des atouts, les constructions traditionnelles
ménageaient les ressources et maximisaient le service rendu dans
un contexte précis.
Le nombre de paramètres
à intégrer aujourd’hui, leur enchevêtrement,
leurs effets différés, le niveau et la diversité
des attentes des utilisateurs, leur rapide évolution dans le temps
font que le contexte a profondément changé. La sagesse et
l’ingéniosité que la nécessité avait
su solliciter ne suffisent plus. Il faut en plus des méthodes,
des procédures, une veille permanente sur les nouvelles techniques
disponibles, une écoute des partenaires et une capacité
d’anticipation.
Les enjeux actuels
Pour un bâtiment, les enjeux
du développement durable peuvent se décrire en fonction
des étapes de sa vie : l’implantation, la phase de conception
et de réalisation, l’exploitation courante.
- L’implantation. C’est la transformation d’un milieu,
avec ses impacts environnementaux sur les sols, la faune et la flore,
le régime des eaux, le paysage et le patrimoine architectural déjà
constitué, mais c’est aussi l’organisation de la cité,
les formes urbaines avec notamment leurs conséquences sur la qualité
de l’air et les ambiances sonores, la mixité sous toutes ses
formes. C’est aussi l’accessibilité, la proximité
des services publics et des activités, le besoin de mobilité
qui en découle. On le voit, toutes ces dimensions sont porteuses
d’enjeux de développement durable.
- La conception et la réalisation. On trouve dans ce chapitre
tous les aspects de la Haute qualité environnementale des bâtiments
(HQE), démarche dont les effets touchent aussi largement au social
– des conditions de travail des compagnons sur les « chantiers
à faibles nuisances » à la maîtrise des charges
d’habitation, sans oublier les cibles de santé – et à
l’économique, avec l’innovation technique qu’elle
suscite auprès des différentes filières professionnelles,
et la réduction de la dépendance énergétique,
par exemple. C’est dans ce cadre qu’il faut aussi envisager
la réponse à une demande sociale, et la capacité
à y répondre dans la durée, à s’adapter
aux changements dans les modes de vie, aux exigences en termes de confort.
- L’exploitation courante. Bien sûr, les impacts environnementaux,
économiques, sociaux et culturels dépendent de l’implantation,
de la conception et de la réalisation de l’ouvrage, mais il
ne s’agit que d’un potentiel, de « talents » au
sens de l’Evangile, qu’il convient de faire fructifier. L’absence
d’entretien ou une maintenance au rabais entraînent une dégradation
rapide des performances d’un bâtiment, alors qu’une «maintenance
améliorative» permet de profiter de toutes les innovations
technologiques pour le moderniser, le rendre plus accueillant, plus attractif,
souvent plus économe aussi, et renforcer sa valeur patrimoniale.
Programme et management
Ces trois stades de la vie du bâtiment ont
été distingués pour mieux décrire ce que «
développement durable » veut dire dans ce cas précis.
Ils n’en restent pas moins indissociables, et c’est aussi dans
les passages de relais que siègent les enjeux : entre l’aménageur
et le promoteur, entre celui-ci et ses équipes de conception et
de travaux, entre le promoteur et les occupants, en passant par les gestionnaires.
Le rôle des charnières est essentiel, et leur bon fonctionnement
est une des clés du développement durable.
Deux exigences ressortent ainsi pour définir
le développement durable concernant un bâtiment, exigences
universelles mais qui prennent un sens particulier dans ce cas : un bon
programme et un bon management. Un programme qui analyse un besoin social
et le transforme en un projet cohérent, performant à tous
égards pour l’ensemble des acteurs un management tout au
long des étapes de la vie du bâtiment : projet, réalisation
et exploitation, tant pour valoriser et améliorer en continu les
performances potentielles que pour adapter l’ouvrage à l’évolution
des besoins.
Bibliographie
- Bâtiment et développement durable, Actes du colloque et des conférences, 20-21 mars 2002, FFB Ile-de-France, Vetter Editions.
- Qualité environnementale des bâtiments, manuel à l’usage de la maîtrise d’ouvrage et des acteurs du Bâtiment, Ademe, 2002.
- Développement durable, villes et territoires, notes du centre de prospective et de veille technologique du ministère de l’Equipement, Jacques Theys, 2000.
- Actes des premières (29-30 novembre 2001) et deuxièmes (9-10 décembre 2002) Assises de la démarche HQE, CD-Rom, association HQE, 4 rue du Recteur Poincaré 75016 Paris.
- Haute qualité environnementale du cadre bâti, Jean Hetzel, Afnor, 2003.
- Habitat et développement durable, Arecoop, 2002.
http://www.constructif.fr/bibliotheque/2003-11/une-demarche-de-progres-pour-le-batiment.html?item_id=2516
© Constructif
Imprimer
Envoyer par mail
Réagir à l'article