Brice TEINTURIER

est directeur général délégué d’Ipsos.

Vincent DUSSEAUX

est chef de groupe chez Ipsos.

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Le bâtiment en France a une belle image

 À la demande de la Fédération Française du Bâtiment, Ipsos a réalisé une enquête auprès des Français et des professionnels du bâtiment sur l'image du secteur. Même si certains stéréotypes perdurent, les Français ont une très bonne image du secteur du bâtiment. Les chefs d'entreprise aussi, mais la conjoncture économique les empêche d'envisager leur avenir sereinement.

« Quand le bâtiment va, tout va ! » Cette maxime, les Français la reprennent à leur compte. En effet, l'enquête réalisée par Ipsos pour la Fédération Française du Bâtiment montre que, parmi les traits d'image détaillés du secteur du bâtiment, l'un de ceux qui ressortent le plus porte sur le « rôle moteur [qu'il joue] dans l'économie française » : 82 % des Français estiment que cette proposition s'applique bien au bâtiment.

Plus généralement, les Français s'accordent pour dire que le secteur est dynamique (à 82 %) et innovant (79 %). Son rôle n'est pas seulement économique.

Pour les Français, le bâtiment contribue aussi à améliorer le cadre et la qualité de vie (83 % d'accord) et à valoriser le patrimoine (82 %). Enfin, près de trois Français sur quatre (74 %) pensent que le bâtiment est un secteur qui embauche.

En spontané, les adjectifs, expressions ou sentiments qui viennent à l'esprit en pensant au secteur du bâtiment en France sont davantage positifs (27 % citent des éléments positifs) que négatifs (24 % de citations). Les évocations positives portent surtout sur l'importance de la demande dans le secteur (« il y a beaucoup de travail ») et la nature du métier (« un beau métier, passionnant, à la fois utile, nécessaire et important »).

À l'opposé, le discours négatif est alimenté par des stéréotypes qui ont la vie dure : le coût des prestations (trop élevé), leur qualité (mauvaise) ou la méfiance à l'égard d'artisans « malhonnêtes ». Au final, cependant, une très large majorité de Français (84 %) ont une bonne image du secteur du bâtiment en France, contre 14 % qui en ont une mauvaise.

Meilleur que l'industrie sur un grand nombre de critères

Face à d'autres secteurs d'activité, le bâtiment est mieux perçu dans de nombreux domaines (voir graphique).

Pour les Français, c'est le secteur qui contribue le plus à la valorisation du patrimoine (au premier rang avec 51 % de citations, largement devant la restauration), qui est le plus impliqué dans le développement durable (43 % de citations, devant l'industrie, qui obtient 26 %), qui contribue le plus à améliorer le cadre et la qualité de vie (35 %, devant les services, qui obtiennent 27 %), qui offre aux jeunes le plus de possibilités d'insertion sur le marché du travail (34 % de citations, devant l'industrie et la restauration) et surtout qui embauche le plus (30 % de citations, devant la restauration, qui obtient 22 %, et les services, 20 %).

Le bâtiment est toutefois devancé sur l'importance économique. Pour les Français, c'est avant tout l'industrie qui joue un rôle moteur dans l'économie française (avec 38 % de citations, suivie du bâtiment à 22 %).

Les caractéristiques de l'enquête

983 Français et 504 professionnels du bâtiment ont été interrogés par téléphone du 23 au 29 septembre 2011. La représentativité de l’échantillon a été assurée par la méthode des quotas : sexe, âge, profession de la personne de référence au sein du foyer, région et catégorie d’agglomération pour le grand public ; taille de l’entreprise et domaine d’activité pour les professionnels du bâtiment. Pour eux, l’échantillon a été raisonné afin d’obtenir suffisamment d’entreprises de plus de dix salariés.

 

L’image du bâtiment comparée à celle des autres
secteurs

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À noter enfin que l'industrie est aussi le secteur d'activité jugé le plus innovant (avec 36 % de citations, suivie du bâtiment à 22 %).

Les professionnels parfois plus critiques

L'image du secteur est très proche chez les professionnels. 84 % des chefs d'entreprise du bâtiment ont une bonne image du secteur (soit une proportion équivalente au grand public), contre 16 % qui en ont une mauvaise image. Comme les Français, une large majorité des professionnels estiment que leur secteur contribue à améliorer le cadre et la qualité de vie des Français (à 91 %), qu'il joue un rôle moteur dans l'économie française (à 90 %), qu'il contribue à la valorisation du patrimoine (à 87 %), qu'il est dynamique (à 87 %) et innovant (à 85 %). Les effets du contexte économique sont plus perceptibles sur l'emploi, les professionnels étant un peu moins nombreux à estimer que le bâtiment est un secteur qui embauche : 61 % le pensent, au lieu de 74 % du grand public.

La comparaison de l'opinion du grand public et de celle des chefs d'entreprise laisse penser qu'il existe parfois un certain malaise dans la profession. Les évocations spontanées sur le secteur du bâtiment sont plus souvent négatives chez les professionnels que dans le grand public. Au-delà du discours factuel, ce sont les évocations négatives qui sont les plus fréquentes (31 %, contre 24 % d'évocations positives). Un discours qui procède surtout du manque de reconnaissance : 12 % des professionnels déplorent la mauvaise image du métier et son manque d'attractivité. D'autres insistent sur les difficultés auxquelles ils doivent faire face : la faible rentabilité (5 % de citations spontanées), les charges (2 %) et, parfois, les coups bas de certains concurrents (4 %).

Une autre divergence apparaît entre les professionnels et le grand public. Elle porte sur le sentiment à l'égard de l'évolution de l'image du secteur. Si, pour la majorité des Français (43 %), l'image du secteur du bâtiment n'a pas changé ces cinq dernières années, pour les professionnels, elle s'est au contraire dégradée (43 %, contre 22 % pour qui elle s'est améliorée et 34 % pour qui elle est restée inchangée). Le sentiment de dégradation est plus fréquent chez les professionnels franciliens (56 %) et chez ceux qui pronostiquent une baisse de leur activité au cours des six prochains mois. Il traduit le malaise qui semble s'être installé dans toute une partie de la profession, fortement touchée par la crise économique et financière depuis 2008.

Des chefs d'entreprise fiers de leur activité mais inquiets pour leur avenir

 

La fierté d'être chef d'entreprise dans le bâtiment et le climat au sein de l'entreprise sont autant d'éléments très motivants pour les professionnels. Une très large majorité (88 %) se disent fiers d'être chefs d'entreprise dans le secteur du bâtiment, dont 61 % « tout à fait fiers ». Le sentiment de fierté est plus fort encore chez ceux qui anticipent un accroissement de leur activité dans les six prochains mois (97 %). Au sein de leur entreprise, les professionnels du bâtiment jugent satisfaisante la situation actuelle en ce qui concerne les conditions de travail (que 92 % jugent bonnes), le climat social (84 %), le niveau des rémunérations (74 %) et la capacité à faire face à la concurrence (71 %). Les chefs d'entreprises de plus de dix salariés sont particulièrement nombreux à juger bon le niveau des rémunérations (84 %). Enfin, une très large majorité des professionnels (85 %) considèrent que le bâtiment est un secteur d'avenir, 50 % partageant « vraiment » ce point de vue.

En revanche, l'incertitude sur la conjoncture économique pèse sur les perspectives de croissance de l'entreprise qu'ils dirigent. La majorité des professionnels du bâtiment (53 %) estiment que l'activité de leur entreprise sera stable dans les six mois à venir. Un quart d'entre eux (25 %) redoutent néanmoins une baisse, tandis que 19 % pronostiquent une croissance modérée (16 %) ou forte (3 %). Dans le second œuvre technique, les chefs d'entreprise sont un peu plus pessimistes que la moyenne : 29 % anticipent une baisse d'activité. Sur ce point, ils rejoignent ceux de l'Île-de-France (38 % anticipent une baisse d'activité), qui semblent davantage affectés par la crise. Les professionnels sont également partagés sur l'évolution de l'activité économique du secteur au cours des six prochains mois (50 % sont pessimistes, contre 47 % d'optimistes). Là encore, le pessimisme est nettement majoritaire dans la branche du second œuvre technique (à 55 %), dans les entreprises de plus de dix salariés (63 %) et en Île-de-France (59 %).

Au niveau microéconomique, la rentabilité et le niveau de la trésorerie de l'entreprise inquiètent une grande partie des patrons du bâtiment. 45 % des professionnels interrogés sont pessimistes sur la rentabilité de leur entreprise (contre 52 % d'optimistes) et 45 % sont pessimistes quant à leur trésorerie (contre 52 % d'optimistes).

Les interrogations concernant l'évolution de l'activité à court terme ainsi que la traditionnelle pénurie de main-d'œuvre dans le secteur semblent alimenter un climat défavorable à l'embauche. 70 % des professionnels du bâtiment sont pessimistes en ce qui concerne leur capacité à embaucher, contre 25 % qui restent optimistes sur cette dimension. Les deux tiers des professionnels (66 %) se déclarent néanmoins optimistes sur le maintien de l'emploi au sein de leur structure, contre 28 % qui ne le sont pas.

La TVA à 5,5 % était un symbole pour la profession

Le taux de TVA réduit à 5,5 % était une mesure particulièrement populaire auprès des professionnels. Son efficacité était incontestée : 92 % des professionnels estiment qu'elle a été efficace pour soutenir l'activité dans le secteur du bâtiment (tout comme 61 % des Français). Même en concurrence avec d'autres dispositifs, c'est la mesure la plus souvent citée par les professionnels comme la plus efficace pour soutenir l'activité - 67 % de citations, devant la baisse des taxes et des impôts sur les entreprises, citée par 58 % des répondants. Son relèvement à 7 %, qui est intervenu après la réalisation de cette enquête, ne manquera pas de peser sur le moral des chefs d'entreprise du bâtiment.

Aux côtés de ce dispositif phare pour le secteur, les autres mesures, bien que moins connues, sont aussi appréciées des professionnels. C'est le cas de l'éco-prêt à taux zéro, que 63 % jugent efficace pour soutenir le secteur (contre 23 % d'avis contraires), du dispositif Scellier (58 % contre 18 %), des aides à l'acquisition de logements (46 % contre 20 %) et de l'augmentation de la construction de logements sociaux (à 41 % contre 27 %). Là encore, les chefs d'entreprise sont rejoints par les Français dans la perception de l'efficacité des différentes mesures.

Seul le plan de relance du gouvernement est jugé inefficace pour soutenir le secteur (par 50 % des professionnels et 52 % des Français). Ces résultats s'expliquent probablement davantage par le climat politique particulièrement défavorable pour la majorité que par une contestation spécifique des mesures présentes dans le plan de relance.

http://www.constructif.fr/bibliotheque/2012-2/le-batiment-en-france-a-une-belle-image.html?item_id=3147
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