Gérard LARCHER

Président du Sénat

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INTRODUCTION

« La démocratie vraie, c’est l’association intime, c’est la fusion de l’État et du citoyen. Aujourd’hui, le citoyen et l’État sont devenus étrangers l’un à l’autre. Le citoyen se détourne de l’État et l’État se méfie du citoyen. Oui, le citoyen se détourne de l’État. La meilleure preuve, le symbole le plus visible, c’est le grand nombre des abstentions. » C’est en ces termes que Pierre Mendès France mettait en garde le pays, dans son discours d’Évreux, en juin 1955. Constat qui entre en résonance avec la situation actuelle. Comment redonner confiance à nos concitoyens et faire vivre la démocratie au XXIe siècle? Telle est l’ambition de ce numéro de Constructif, qui alimente ainsi le nécessaire débat sur la crise de la représentation et les conditions de son renouveau.

La démocratie représentative est en crise. La montée du populisme, la crise des Gilets jaunes, la polarisation des discours politiques en sont un symptôme. La concentration du pouvoir, sa centralisation et sa verticalité en sont un autre. Un rapport du Sénat de 2017 – « Démocratie représentative, démocratie paritaire : comment décider avec efficacité et légitimité en France en 2017? » – analysait cette crise entourant la décision publique et formulait plusieurs propositions de nature à conforter une « démocratie coopérative ».

Pour y faire face, il faut d’abord un nouvel équilibre des pouvoirs entre l’État et les collectivités territoriales, équilibre reposant sur une relation de confiance. La crise sanitaire a montré, une fois de plus, combien l’État central pouvait être lourd et empêtré, combien il a eu besoin de l’action des maires, des présidents de conseils départementaux et régionaux, comme des initiatives des entreprises et de la société civile. La verticalité de la gouvernance conduit à l’impuissance. La décision doit être rapprochée du citoyen.

Il faut ensuite articuler la démocratie représentative, seule légitime, avec des mécanismes de démocratie participative. Nous y sommes parvenus avec la démocratie sociale et l’article L.1 du Code du travail, qui préserve, de façon souple, la primauté de la loi.

En aucun cas, on ne peut faire d’une convention citoyenne un « Parlement des citoyens ». C’est méconnaître la force de l’élection, qu’il s’agisse du président de la République ou du Parlement, ou du référendum, et son corollaire, la responsabilité devant l’électeur. Pour autant, la démocratie participative, dans ses différentes formes (pétition, consultation numérique, référendum local, convention de citoyens), est devenue un complément utile à la démocratie représentative. Il reste à l’organiser et à en définir les limites.

Pour conclure, n’oublions jamais l’avertissement de Philippe Séguin : « En vérité il n’y a pas de démocratie réelle sans culture démocratique, sans l’attachement largement partagé à des principes inviolables et sacrés qui garantissent le respect d’une certaine idée de l’homme. »

http://www.constructif.fr/bibliotheque/2022-3/introduction.html?item_id=5816
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