Président du Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB).
« Accélérer la mise sur le marché de produits innovants »
Alors que la transition énergétique en cours est une opportunité majeure pour le secteur, la capacité financière est considérée comme le principal frein à l'innovation par les TPE-PME industrielles du secteur. L'accompagnement des petites entreprises constitue une véritable voie de progrès pour réduire coûts et délais d'innovation.
Début 2015, le Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB) a réalisé, avec l'Ifop, un premier baromètre consacré à l'innovation industrielle des TPE-PME dans le secteur du bâtiment 1. Il ressort de ce baromètre que l'innovation occupe une place centrale dans la stratégie des TPE-PME du secteur. Ainsi, 34 % des entreprises interrogées déclarent avoir mis au point des innovations au cours des deux dernières années, et plus de 60 % estiment que l'innovation est importante et comptent innover dans les trois années qui viennent.
64 % des TPE-PME ayant innové déclarent que leur innovation concerne la facilité d'installation. Viennent ensuite la sécurité et la durabilité (53 %) et la performance énergétique (50 %). Cela traduit une réelle prise de conscience, de la part des industriels porteurs des produits de demain, des défis auxquels le secteur du bâtiment devra répondre, non seulement pour construire le bâtiment durable de demain, mais aussi pour rénover le parc de bâtiments anciens. La transition énergétique, la révolution numérique et l'arrivée d'une demande de garantie de performances accentuent le besoin de disposer de produits de plus en plus performants et, surtout, mieux conçus pour limiter les risques de désordre au moment de la mise en oeuvre.
Lorsqu'on interroge les entreprises qui n'ont pas innové au cours des deux dernières années à propos de leurs raisons, le frein évoqué le plus fréquemment est celui du manque de moyens financiers (à hauteur de 53 %). Viennent ensuite des raisons plus en lien avec des choix assumés de l'entreprise : 47 % déclarent ainsi ne pas avoir innové car leur carnet de commandes est suffisamment rempli et 42 % par manque de temps. Enfin, 42 % déclarent ne pas avoir innové par manque de visibilité sur le potentiel des innovations qu'elles pourraient développer.
Dernier enseignement notable de ce baromètre, les TPE-PME interrogées mettent en évidence le caractère ambivalent de la réglementation : la moitié déclarent qu'elles considèrent plutôt les évolutions réglementaires comme un obstacle à l'innovation, alors que 25 % affirment au contraire qu'elles constituent un accélérateur.
La transition énergétique, une opportunité
Les objectifs ambitieux de construction de 500 000 logements et de rénovation de 500 000 logements par an d'ici à 2017, annoncés par le président de la République le 9 janvier 2014, et leurs déclinaisons dans le projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte constituent de réelles opportunités pour le secteur du bâtiment. Ces ambitions ne pourront en effet être atteintes sans innovations ou sans ruptures technologiques.
La transition énergétique permettra la mise sur le marché et le développement de nouveaux produits et procédés constructifs pour construire et rénover les bâtiments durables de demain. À ce moteur s'ajoutent deux éléments générateurs d'une dynamique d'innovation dans le secteur du bâtiment :
- l'arrivée de la numérisation des bâtiments au travers de la maquette numérique. Cette véritable révolution dans l'acte de construire est fortement soutenue par le gouvernement, qui a décidé, lors du Conseil des ministres du 10 décembre 2014, d'affecter 20 millions d'euros du fonds de compensation des risques d'assurance construction pour la mise en oeuvre d'un plan d'action consacré à la « Transition numérique dans le bâtiment »
- une demande de plus en plus marquée de garantie contractuelle de résultat, principalement pour la performance thermique des ouvrages : le maître d'ouvrage veut avoir l'assurance que le bâtiment qu'on lui livre, non seulement pour le marché du neuf mais aussi lors des rénovations lourdes, a les performances du bâtiment qu'on lui a vendu ! Cette attente conduit à une nécessaire professionnalisation des entreprises. C'est toute la logique de la qualification RGE (Reconnu garant de l'environnement), mise en place par le gouvernement, qui permettra de s'y préparer.
Pour tous les acteurs économiques engagés dans la construction de la ville durable, l'innovation est donc un levier de développement et de compétitivité incontournable pour se préparer aux enjeux de demain.
Des procédures fiables et impartiales
Face aux enjeux financiers liés aux évolutions que connaît le secteur de la construction, le marché a besoin, aujourd'hui plus que jamais, d'une concurrence libre et non biaisée. Le risque existe, en effet, de voir le marché du bâtiment faussé par l'arrivée de produits aux performances dites révolutionnaires mais en réalité trompeuses. Les premières victimes en seraient les industriels et les emplois. Mais également les citoyens, qui risquent de ne pas bénéficier des gains espérés grâce aux travaux de rénovation qu'ils auront réalisés.
L'innovation des produits de construction passe par la nécessité de conserver des procédures d'évaluation éprouvées (dont la plus fréquemment délivrée en France est l'Avis technique), impartiales et techniquement fondées, garantissant le respect des réglementations, l'aptitude à l'usage et la réduction drastique des risques de désordre. De nombreuses entreprises sont attachées à ces procédures, véritables leviers de développement de leurs innovations, qui suscitent la confiance aussi bien des assureurs que des prescripteurs et utilisateurs de produits. Ce lien de confiance est la garantie pour tous d'une mise sur le marché efficace de produits innovants capables de tenir leurs promesses.
Accompagner les TPE-PME
Bien entendu, ces évaluations représentent un coût et nécessitent des délais, dont les niveaux sont comparables aux procédures d'évaluation de nos homologues européens. L'ambition du CSTB est bien évidemment de poursuivre ses efforts pour réduire ces coûts et ces délais tout en maintenant le même niveau de qualité technique des innovations.
Mais l'enjeu principal aujourd'hui est d'accompagner, le plus en amont en possible, les TPE-PME qui souhaitent innover en identifiant avec elles les sujets nécessitant un effort de R & D ou encore la procédure d'évaluation la plus adaptée à leurs produits et à leur capacités financières, afin d'optimiser les coûts et délais d'une mise sur le marché réussie de leurs produits.
Avec cet objectif, le CSTB a mis en place un service d'accueil et d'accompagnement dédié aux porteurs d'innovation. Afin de démultiplier cette offre d'accompagnement, en proximité avec les entreprises qui innovent, il s'est également engagé à mettre en place un « réseau national d'accompagnement », composé de partenaires régionaux 2 couvrant l'ensemble du territoire.
Il est clair que c'est ensemble, et par cette stratégie d'ouverture vers les partenaires territoriaux et les régions, que nous parviendrons à accélérer le développement des produits du bâtiment de demain et à relever les défis du développement durable.
http://www.constructif.fr/bibliotheque/2015-6/«-nbspaccelerer-la-mise-sur-le-marche-de-produits-innovants-nbsp».html?item_id=3481
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