Pierre Jean COULON

Membre de la direction du Comité économique et social européen

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La nécessité d’une sobriété viable

« Décarboner » : le verbe, désormais emblématique, se retrouve sur toutes les lèvres et dans toutes les études prospectives, à l’échelle des États, des institutions internationales mais aussi des entreprises et des particuliers.

Chacun y va de son remède, de sa solution – surtout pour les autres.

Les enjeux sont colossaux, le réchauffement climatique ayant pour conséquences, dans les décennies à venir, non seulement la disparition de milliers d’espèces mais aussi celle d’États insulaires, des déplacements de millions d’habitants du Sud vers le Nord, et des changements radicaux dans nos modes de vie.

À ceux qui disent que l’on en fait trop sur le climat, rappelons ce chiffre têtu : le coût de l’inaction, en la matière, se monte à près de 1 500 milliards d’euros par an.

L’énergie – qui entre dans le questionnement de tous les autres sujets – est concernée au premier chef. À l’irruption des énergies renouvelables s’ajoute l’arrivée de l’hydrogène et de nouveaux carburants pour le transport maritime, l’aviation, le ferroviaire.

Le retour des conflits, notamment dans l’est de l’Europe, avec leurs répercussions, oblige à accélérer le mouvement. La durée des transitions nécessaires des différents scénarios prévus à l’horizon 2050 devrait être raccourcie de dix ans. Une telle ambition nécessite une accélération des recherches en matière de technologies et d’organisation, des financements plus conséquents – particulièrement en matière de logement – ainsi que des économies drastiques. Une idée-force consiste à passer de la surconsommation à la sobriété, sans verser dans la décroissance.

La sobriété nécessaire doit être viable, conciliant croissance et usage raisonné des ressources naturelles. Sur ce registre, s’il est une activité qui peut largement contribuer à des lendemains vertueux, c’est bien le bâtiment. Avec de nouvelles constructions aux matériaux plus sobres et des rénovations plus nombreuses et plus efficaces, ce secteur déploie des solutions concrètes, plusieurs fois gagnantes pour nos sociétés : gagnantes pour la planète ; gagnantes pour de très nombreuses entreprises, notamment petites et moyennes ; gagnantes pour l’emploi ; gagnantes contre la précarité énergétique, fléau qui touche près de 100 millions de personnes en Europe.

Alors, chers gouvernants, notamment sur le plan européen, nous attendons de vous moins d’incantations et de plans sur la comète, et davantage d’injection de financements là où il le faut, avec des modalités administratives simples (guichets uniques, financements ciblés). Pour de vraies solutions, au plus près des lieux de vie et d’activité des citoyens.

http://www.constructif.fr/bibliotheque/2023-3/la-necessite-d-une-sobriete-viable.html?item_id=7837
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